Est-ce qu’une stratégie qui intègre des dimensions sociales, environnementales et de bonne gouvernance contribue à la maîtrise des risques d’entreprise ?

Growth, business, money.

L’étude 2020 d’Oprisko complète est disponible ici : https://rushfiles.one/client/publiclink.aspx?id=zlhIk8PT8d

Qui d’entre nous a déjà entendu parler des critères ESG [1] ? Ou bien des 17 objectifs de développement durable (ODD) à atteindre d’ici 2030 (subdivisés en 169 cibles avec des indicateurs spécifiques) ? Et pourtant, les débats sont omniprésents depuis des années. Les médias traitent en permanence de développement durable, de responsabilité sociétale de l’entreprise (RSE), de Charte Mondiale de l’ONU, d’agenda 2030[2], de stratégie 2050 (neutralité carbone), des objectifs de développement durable onusiens de 2015 (ODD).

Au-delà de ce jargon d’initié, la finalité reste la même, à savoir entamer la transformation qui mènera les populations à vivre dans de meilleures conditions sur terre. Il s’agit concrètement de repenser le modèle économique, en encadrant le développement économique avec des piliers environnementaux, sociaux et éthiques, afin que la croissance puisse être durable.

Évidemment cette transformation aura des impacts à l’avenir dans nos sociétés et dans les entreprises. Et nous sommes d’avis que les entreprises qui n’adopteront pas cette démarche d’intégration de « développement durable » s’exposeront à des risques accrus, d’où une gestion des risques innovante à implémenter. D’autant plus que les consommateurs et les collaborateurs des entreprises sont dorénavant plus attentifs et davantage sensibilisés à ces problématiques ; et en légiférant, les gouvernements se sont engagés pour une transition vers des économies post-carbone et responsables.

En somme, prendre en compte cet aspect « développement durable » correspond à un équilibrage entre l’efficacité économique (création de richesse et conditions de vie matérielle), la responsabilité environnementale (dimension écologique, écosystème) et l’équité sociale (santé, éducation). Le business oui, mais plus à n’importe quel prix.

Dans ce contexte, le postulat de notre étude était qu’une bonne stratégie d’entreprise doit intégrer des paramètres économiques, sociaux et respectueux de l’environnement. Car, pensons-nous, une stratégie qui intègre des dimensions sociales, environnementales et de bonne gouvernance contribue à la maîtrise des risques d’entreprise.

Toute la question est de savoir comment intégrer des principes de développement durable dans la gestion des risques opérationnels de l’entreprise. Notre étude de terrain visait à identifier les bonnes pratiques en la matière et si, pour des entreprises qui appliquent véritablement cette stratégie, cela permet effectivement de gérer plus efficacement ces risques.

A la vue des interviews collectées, le constat est mitigé. Alors que l’enjeu de la durabilité est clairement identifié, les mesures mises en place semblent ridicules, et les moyens engagés pour atteindre les objectifs paraissent dérisoires. 

Hormis le CRO de l’Etat de Genève, rares sont les organisations qui connaissent la définition du développement durable telle qu’elle ressort du Rapport Brundtland (1987) : « Le développement durable doit répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs ». Mais peu importe au fond, car les sondés ont conscience que la nature est vulnérable et les ressources de la planète limitées. Pour preuve, les inquiétudes et les mesures sont principalement centrées sur les aspects environnementaux, parfois sociétaux, rarement de gouvernance (ESG). La « durabilité » reste un concept intuitif et rassembleur, mais difficile à cerner, et à fortiori rarement normé. Rarement des chartes sont rédigées, et les sondés évoquent plutôt des principes, des critères (code de conduite), voire un esprit ou un système de valeurs.

Le tour d’horizon proposé dans cette étude a permis de mieux faire connaître les mesures en place, qui peuvent se regrouper en deux catégories : les mesures commerciales à l’adresse des clients (centrées sur l’offre des produits et services), comme la notation de la durabilité des clients et des fournisseurs par exemple ; et les mesures internes à l’entreprise, comme le tri des déchets, les économies d’énergie, ou l’incitation à la mobilité douce par exemple. Le chemin est long et sinueux pour que les organisations progressent réellement dans le domaine de la durabilité.

En outre notre enquête a mis en exergue certains bénéfices et inconvénients de la durabilité pour les organisations. Du point de vue économique, nous avons relevé que des organisations améliorent dans une certaine mesure leur profitabilité en augmentant leurs volumes d’affaires ou leurs prix, en rationalisant leurs processus ou en adaptant les salaires. Au niveau social, des organisations gèrent le turnover en limitant le risque de démission des employés tout en attirant plus facilement de nouveaux candidats grâce aux bienfaits des « valeurs de durabilité ». Cependant, l’horizon des investissements est plus long, car les opérations sont peu rentables à court terme. 

La transformation durable des organisations nécessite une analyse approfondie afin que soit mise en place une approche qui intègre les parties prenantes internes et externes à l’organisation. 


[1] Les mesures (ESG) sont les trois piliers de l’analyse extra-financière qui permettent d’évaluer la stratégie durable de l’entreprise : 1) environnementale (consommation d’énergie, tri des déchets, transports et mobilité, matériaux), 2) sociale (politique RH, égalité homme/femmes, santé et sécurité au travail, respect des droits humains, conditions de travail), 3) gouvernance (achats responsables, dialogue avec les parties prenantes, lutte contre la corruption et la fraude).

[2] Le Conseil fédéral attend des entreprises domiciliées en Suisse qu’elles assument leurs responsabilités environnementales et sociales dans toutes leurs activités. Rapport national 2018.